Hamid Tahri, in El Watan
Neveu des Racim, il en a subi l’influence, du moins a été marqué par leur trajectoire, puisque ce
sont eux qui l’ont accompagné dans son parcours artistique.
Il y a 15 ans, le 7 février 2010, nous quittait, à El Biar, le grand artiste plasticien Ali Khodja, après
une vie accomplie au service de l’art qu’il a magnifié. Il ne pouvait en être autrement, pour un
parent et familier des Frères Omar et Mohamed Racim, qui l’avaient sûrement marqué. Pour
perpétuer sa mémoire cet hommage.
Dans sa combinaison de travail, on aurait dit un chef d’équipe rompu aux rugueuses tâches
manuelles, alors qu’il est tout de finesse. Lui n’a pas d’équipe, il est seul dans son univers, avec
ses matériaux qui restent ses uniques partenaires avec lesquels, il peut donner vie à une toile,
la rendant éternelle. L’artiste qu’il est toujours en quête d’une émotion, d’une trouvaille qu’il
transformera en une œuvre d’art.
A 83 ans, Ali continue de produire et on ne peut dire que l’âge a une quelconque emprise sur
son comportement. Dans le vaste atelier, où les toiles sont posées pêle-mêle dans un fouillis où,
miracle suprême, il arrive à se retrouver, Ali passe le plus clair de son temps. «C’est dans le
désordre qu’on se retrouve, car on ne doit pas forcément se plier aux convenances.
L’artiste est comme ça et nul ne peut le changer», avoue-t-il d’un ton malicieux. Ici, on a le
sentiment d’une maison qui respire, se transforme, vit en quelque sorte par un délicat et
passionnant travail, qui nous transporte, nous envoûte et nous transforme. Il y a là quelque
chose d’impalpable, mais hautement symbolique et cela correspond exactement à ce
qu’évoque l’auteur de ces toiles qui ont dû faire plus d’un voyage.
Alors, lorsqu’on lui pose la question de savoir pourquoi il est plus connu à Paris qu’à Alger, il se
fend d’un rire étonné pour dire tout modestement que son art est universel et que cette
remarque n’est pas forcément fondée. «Il est vrai que je suis connu par un milieu restreint. Je
n’ai pas cette prétention, ni ce caractère de me montrer, d’expliquer mon œuvre», relève-t-il
avec une rare modestie. Doyen des peintres algériens, Ali s’enorgueillit de garder encore un
esprit jeune.
Neveu des Racim, il en a subi l’influence, du moins a été marqué par leur trajectoire, puisque ce
sont eux qui l’ont accompagné dans son parcours artistique. «Omar était dans la pure tradition
avec l’enluminure et la calligraphie, alors que Mohamed, miniaturiste, était plus ouvert au
monde extérieur. Tous deux ont vécu à Montparnasse et côtoyé les grands maîtres de l’époque.
Leur apport à l’art algérien est considérable. Les Racim restent des modèles dans leur
domaine.» A leur propos, Ali dira qu’il n’a pas été influencé sur le plan pictural, mais sur celui
des idées et de la pensée.
Il y avait des questionnements à l’époque et il fallait trouver des solutions. La nature,
l’ornement, les à-plats, les influences de la Chine et de Byzance et puis, il y a eu la renaissance,
avec sa source de lumière. Là, je peux dire que l’impressionnisme a beaucoup apporté à l’art,
non seulement sur le plan pictural, mais aussi sur celui de l’humanisme. C’était une véritable
révolution qui a permis à l’artiste d’être réellement le témoin de son temps.»